Le Fly Pan Am - N'écoutez pas

Volez Pan Am !

Traditions expérimentale sonore & underground rock se rejoignent avec cette compagnie sonique, Le Fly Pan Am, volez Pan Am, (référence évidente au crash du 21 décembre 1988 & aux 259 morts de Lockerbie), dans une sarabande pot(l)ache & tongue-in-cheek : une bande passante passe, vite - ils sont hilares & silencieux, on ne distingue pas vraiment leurs instruments - bitume incandescent, subtil... Méfiance, cette compagnie est sérieusement déconnante, tout de même.

Essais fragiles d’aplomb.

Ce qui frappe d’emblée : ces voix rentrées & ces grosses guitares saturées dont on n’avait pas entendu l’équivalent sourd (low treble) depuis My Bloody Valentine. On peut dire qu’ils savaient ce qu’ils voulaient en terme de mixage : embrouiller des kilomètres de bande magnétique, les nimber de doux souffle un peu comme là, dehors, ce mois de janvier par exemple. Faire plus vrai que vrai, ou refaire le silence du monde avec des klaxons et des BO de films d’angoisse (voir plus bas).

"N’écoutez pas" forge l’oreille pour qu’elle l’écoute, il n’est pas fait à l’origine pour elle ; il retapisse les tympans de sensations fortes parfois inédites (i.e. le fameux clic des CDs gravés maison achetés peu chers dont le clic entre ainsi au panthéon des objets sonores détournés). Vous venez de rater le coche : la bande est passée. Repassez (voir plus bas).

Echos

Les salves lancinantes du velvet underground. Le "uh uh" fameux de Sympathy for the devil. Les voix téléphonées des Pixies. Deus, énervé. Tout a été raté, reprenons au début, comment ça faisait, faisons l’inverse : mettons du son, pataugeons là-dedans un moment (voir plus bas), ça finira par nous ressembler vraisemblablement.

Concrète torchon

BO de films d’angoisse, klaxons, aspirations, mille couches rappellent ici et là que les Pierres, Henry et Schaeffer, ont existé - Le Fly Pan Am a bien compris que tout bruit fait une bonne caisse claire, tout souffle un bien bon oreiller, que toute voix crachotante est préférable à cette transparence hi-tech dans laquelle jusqu’au soupir d’ennui de la groupie s’entend. Voyez comme ils sont heureux. Un peu comme ces enfants sales qui pataugent dans la boue (voir plus haut) ; ils en font un puissant onguent pour repousser la vermine, un or pâteux, en somme. "N’écoutez pas" : écoutez voir comment ils torchent ça.

Parlez-vous noise, do you speak vitesse

Z(a)ou(m) ! Des titres : mélange brusque-naïf d’anglais / français, déconcertant : "autant zig-zag", "ex-éleveurs de renards argentés", "Le faux pas aimer vous souhaite d’être follement ami". Ouais, autant zig-zag dans le fil du jour vous souhaitant, éleveurs placides d’egos un peu véreux sans doute, d’accéder un peu pour une fois à du direct, d’écouter Pan, de prendre à pleine main l’ambiguïté du monde, vous en faire une tunique pour les grands jours. C’est la vitesse du disque qui vous sauvera ; n’eut été votre désespérante lourdeur, vous auriez pu grimper mais... entraînez-vous déjà pour le prochain passage, l’oreille est l’organe de la plus brusque détente, c’est par là que ça passe lorsqu’il s’agit d’agripper au bon tempo la bande passante. Vous venez encore de les rater.

"This air-disaster of the century has now its own homepage on the internet."( The Pan Am 103 Crash Website) Connerie imbitable du monde. Etat de fait inqualifiable des épousailles post-modernes du burlesque horrifiant, de l’innocence crasse et des technologies de l’information managées new style. Là-dedans, Le Fly Pan Am envoie ses oeufs brouillés à la chaîne comme des pépites d’or enduites de merde pour tacher, des tartes à la crème dégoulinantes ultra-sérieuses ou pas : tout est dans le geste, seul le résultat compte.

Outro

Ils me rattrapent vite, se saisissent de ma chaussure droite, ils me tirent par terre, je tombe, ils me font des gli-glis je ne supporte pas ça, c’est mon point faible (voilà au moins une confidence de faite), ils m’enduisent, ça y est, je suis tout retapissé en collage psychédélique (comme la pochette). Je me sens déjà d’humeur toute rose... Oh la là, qu’est-ce qu’ils me font - hé, vous, ne restez pas comme ça, là, oh, oui vous, n’écoutez pas.